Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
2 septembre 1808, Saint-Cloud
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Je reçois ta lettre, mon cher Eugène, et j'éprouve bien que l'éloignement est une chose bien fâcheuse car on ne peut plus s'entendre. Tu as bien raison pour ce que tu me dis : on me blâmera de rester si longtemps loin de mon mari. Mais juge ma position : d'abord, pour l'instant, ma santé est encore trop mauvaise, elle se ressent bien du peu de bonheur que j'ai eu jusqu'à présent et j'ai été si tourmentée pendant mes couches que je ne sais comment mon lait est passé ; je ne puis encore rien manger et j'ai des maux de reins, surtout quand il fait humide, qui me font beaucoup souffrir. J'ai absolument besoin des eaux, mais il est trop tard pour y aller cette année. Mes enfants sont bien portants, mais ils sont délicats ; ils ont besoin de grands soins ; les médecins assurent que le climat de la Hollande leur est contraire ; j'en ai une expérience fatale. Que veux-tu que je fasse ? Je ne puis me décider à courir encore le risque de les perdre. Si le Roi était comme il doit être pour moi, je les laisserais ici jusqu'à un âge où ils auraient pris le dessus et j'irais en Hollande. Je suis capable de faire tous les sacrifices pour faire mon devoir, je l'ai déjà prouvé. Mais quel devoir ai-je à remplir auprès de quelqu'un qui me traite aussi indignement ? Tant que ce n'était que de la jalousie, de la méfiance, on peut supporter cela quand personne n'en est instruit. Mais, quand on est Roi on ne se cache plus et quand on regarde sa femme comme un ennemi et qu'on cherche à en faire dire du mal, on réussit parce qu'on en a tous les moyens.
L'année dernière, je ne l'ai que trop senti. L'Empereur était loin, et on me faisait payer l'amitié et la justice qu'il m'avait rendues quelquefois. Crois-moi, mon cher Eugène, si je retourne en Hollande comme j'y ai été, je serai méprisée, parce que quand on enferme quelqu'un, qu'on ne voit pas ce qu'elle fait et que la personne qui en dit du mal est aimée et qu'elle le mérite comme le Roi, qui (je suis trop juste pour ne pas le dire) cherche à faire le bien du pays, certainement, mon cher Eugène, on est avec. Je te dirai même plus : en France on le croirait aussi et peut-être même, en m'excusant, l'Empereur croirait le mal qu'on dirait de moi.
N'ai-je pas reçu une lettre de lui de Tilsit où il me dit : "Ma fille, il faut céder à son mari, même sur les choses où vous auriez des droits?" Mon Dieu ! qu'est-ce que je lui disputais ? J'étais comme dans un château fort, ne voyant pas un chat. Veux-tu que je te dise à quel point j'étais malheureuse ? Tu en riras peut-être, mais je t'assure que j'en étais réduite là. Je faisais des voeux tous les jours pour que les Anglais fasse une petite descente et qu'ils puissent me faire prisonnière ; je t'assure que, machinalement, j'allais toujours me promener du côté de la mer. Je me disais : "Si les Anglais me prennent, que me feront-ils ? Qu'ils me mettent dans une tour, ils ne me laisseront manquer de rien ; je pourrais m'occuper et, du moins, je serai tranquille." Je te prie de croire que mes enfants n'étaient pas de la partie et il fallait que je fusse bien malheureuse pour souhaiter de m'en séparer.
Enfin, à présent, le Roi est si fâché que j'ai été trop souffrante pour aller faire mes couches en Hollande qu'il ne m'écrit plus et qu'il ne souhaite nullement de me voir ; du moins il le dit. J'ai parlé à l'Empereur qui a été bien bon pour moi. Il m'a dit d'attendre ; que, quand le Roi me ferait dire de venir, il faudrait faire mes conditions avec lui, et, s'il était mal pour moi, de revenir ; mais, pour faire cela, il faut avoir une existence indépendante et de la fortune et je n'ai rien de tout cela ; quand j'étais malheureuse, à moins de faire comme Mme de Laturbie et de demander asile au premier passant, avais-je même une voiture pour revenir en France, et si quelqu'un voulait m'en prêter une, avais-je de quoi le récompenser du mal qu'on lui aurait fait ? Ma position est plus fâcheuse que tu ne peux le croire ; j'étais née pour être une bonne femme, et le monde me jugera autrement. Si je vais en Hollande, ce sera tout le monde et, si je reste ici, du moins les personnes qui me verront me rendront justice et verront que je mets toujours mon bonheur à faire bien.
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Quant aux Hollandais, ils ne peuvent pas m'aimer ; ils suffiraient qu'ils s'adressassent à moi pour quelque grâce pour ne jamais l'obtenir. Il y a des malheureux : le Roi les secourait, mais le nom de la Reine ne pouvait jamais être à côté du sien. On est beaucoup plus coupable quand on croit qu'on peut faire le bien et qu'on ne le fait pas, au lieu qu'étant loin, ils ne me donnent qu'un blâme qui est de ne pas les aimer et de préférer la France. A eux je leur répondrai à cela : "On m'y connaît depuis que je suis née ; si quelqu'un dit du mal de moi, j'aurai des défenseurs, au lieu qu'ailleurs je n'en aurais pas." Quant à mes enfants, l'un sera roi de Hollande, l'autre n'aura rien du tout ; mais l'Empereur est bon pour eux et les protègera, j'espère ; voilà toute mon ambition. Ensuite, que mon cher Eugène ne me blâme pas, qu'il songe bien que, quand on a souffert six ans avec courage, il vient un temps et un âge où on n'en a plus la force. Au reste je suis sûre que si tu étais près de moi, tu me conseillerais tout ce que je fais et, si cette preuve d'éloignement me fait de la peine, l'intérêt qui te l'a dictée me console et même me rend bien heureuse puisqu'elle me prouve l'attachement que tu me portes. Je t'embrasse tendrement.
Mon petit garçon a été vacciné ; il est venu hier pour la première fois voir l'Empereur.
Hortense
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Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
3 septembre 1808, Saint-Cloud
Je reçois à présent une lettre du Roi, mon cher Eugène, et je compte en parler à l'Empereur, car, vraiment, c'est trop fort, et il faudra bien que le monde soit instruit de nos démêlés, car nous ne pouvons plus rester comme cela, et je vois bien qu'il faut être tout à fait séparés.
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Nous nous sommes raccomodés aux eaux ; je suis devenue grosse. J'étais si souffrante que, sans faire une fausse couche, je n'aurais pu entreprendre un voyage en Hollande : voilà un crime si affreux que le Roi a dit que, si je retournais en Hollande, il ne me verrait pas ! Il me demande mon fils. Je lui écris, il y a encore quelques jours, qu'il devrait plutôt venir le voir, que, le climat de la Hollande lui étant contraire, il devait pardonner une mère de retarder autant que possible d'obéir à ses volontés quand c'était pour sauver la vie de son enfant. Voilà enfin la réponse qu'il me fait : il me dit de ne plus lui écrire, car il me renverra mes lettres ; que, d'après la conduite qu'il a tenue depuis un an, il avait prouvé qu'il n'avait plus les droits d'un époux, ni aux yeux de Dieu, ni aux yeux des hommes, et que rien dans la vie ne pourrait nous réunir, et il ajoute : "Les malheureuses dissensions entre nous ont causé tous les maux de ma famille. J'ai gémi plus d'une fois en silence sur la fatale destinée qui attachera peut-être le malheur durable des miens à cette malheureuse union... Mais ce qui me console, c'est de n'avoir plus rien à démêler avec vous... Si j'étais moins attché à mes devoirs et à ma famille, vous auriez vu que je n'étais ni un sot ni un poltron, mais il vous était permis de me juger comme bon vous semblait. Puissiez-vous ne faire et n'avoir fait de mal qu'à moi ! Que vos enfants et ma famille puissent ne pas s'en ressentir et je serais trop heureux... Adieu, Madame, Je souhaite, pour vous-même et les miens, que vos projets ne s'accomplissent pas. Adieu donc pour toujours. Soyez contente et heureuse."
Je t'ai mis les principales choses ; je ne sais si tu y comprendras quelque chose ; quant à moi, je n'y comprends rien.
Quels sont donc ces projets dont il me parle ? Il me connaît bien ; je n'ai de désir que d'être tranquille et que mes enfants se portent bien.
Que veux-tu que je fasse, car, en vérité, je crois qu'il est fou ? Ah ! je vois bien que tout cela est cette malheureuse idée qu'il avait pour l'Empereur : mais on ne mérite pas d'avoir une femme vertueuse quand on est capable de la juger si mal !
Mais tout cela ne m'étonne pas ; il parle beaucoup de vertu, mais il n'y croit pas.
Adieu, mon cher Eugène, comment finira tout ceci ? Sans mes enfants, qui sont encore trop jeunes pour ne pas pouvoir se passer de moi, je demanderais bien à aller rester près de toi : du moins j'aurais un bon juge et un bon soutien.
Hortense
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Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
novembre 1808, Paris
M. Verdot te remettra ma lettre, mon cher Eugène. Il espère que tu pourras lui donner une petite place, et nous lui devons puisque l'Impératrice ne peut rien faire pour lui.
Je saisis en même temps cette occasion pour te gronder : vraiment tu ne m'écris pas assez souvent, cat tu sais combien j'ai besoin que tu penses à moi. C'est quand on est malheureux que l'on a besoin de ses amis, et qui le sera plus que toi ?
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Je suis décidément brouillée avec mon mari : je n'entends pas plus parler de lui que s'il n'existait pas. L'Empereur, à qui j'en ai parlé, m'a dit d'attendre, mais, toujours en attendant, le monde n'est pas bon, et qui sait si on me rendra la justice que je mérite ? A reste, je reste à Malmaison avec l'Impératrice : je suis là comme étant demoiselle ; je fais de la musique, je dessine, et, de plus, je soigne mes petits enfants. Il n'y a que ma santé qui est bien mauvaise : je maigris extrêmement ; il me faudra les eaux absolument l'année prochaine.
Et si ces vilaines affaires d'Espagne sont finies cet hiver, viendras-tu nous voir ? Que de choses nous aurons à nous dire ! Ce sera bien autre chose que ce que la reine de Naples t'aura conté. Je suis bien curieuse de savoir tout ce qu'elle t'aura dit, mais tu sais qu'avec elle il ne faut en croire que la moitié.
Adieu, je t'embrasse comme je t'aime.
Hortense
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Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
7 novembre 1808, Paris
Ta lettre m'a fait du bien, mon cher Eugène ; je suis bien sûre que je trouverai toujours un soutien en toi et j'en ai besoin pour mon coeur et pour ma tranquillité.
L'Empereur est toujours bon pour moi, mais il paraît ne pas vouloir se mêler ouvertement de mes démêlés avec mon mari. Mais il a désiré que je vienne demeurer avec l'Impératrice et c'est prouver qu'il me soutient un peu ; aussi cela m'a-t-il fait grand plaisir.
Tu recevras sans doute ma lettre le jour de notre fête ; qu'il y a longtemps que nous l'avons passée ensemble ! Notre véritable fête sera quand nous pourrons être réunis, car, pour moi, hors cela il n'y a plus de jours de fête.
Je t'envoie un petit nécessaire qui pourra te servir, comme tu voyages beaucoup, et tu penseras à moi en t'en servant.
Adieu, je t'embrasse comme je t'aime et c'est bien tendrement. Mille choses à ma soeur ; on dit ma petite nièce charmante ; mon dernier petit garçon, depuis qu'il a changé de nourrice, est superbe ; il se porte à merveille.
Hortense
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Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
9 décembre 1808, Paris
Nous attendons tous les jours la nouvelle de l'accouchement de ma soeur. Tu penses que c'est avec bien de l'impatience. Elle a une si bonne santé, et puis elle est heureuse. Voilà bien des raisons qui doivent nous rassurer et faire penser que tout se passera bien.
Je ne t'ai pas écrit depuis bien longtemps, mais j'ai été bien souffrante. On dit que c'est une crise heureuse, et que cela arrêtera le dépérissement que j'éprouvais depuis quelques temps. Corvisart trouve même que c'est la première fois, depuis le malheur que j'ai éprouvé, qu'il trouve mon pouls naturel. Dieu veuille que ma santé se rétablisse, car j'en ai bien besoin ! Cela donne le courage de supporter bien des choses et on finit par être à charge à tout le monde quand on est toujours souffrante. Je suis si maigrie que tu ne me reconnaîtrais pas ; mais on me donne l'espérance de reprendre un peu, et cependant je crois qu'il faut la saison des eaux pour me rétablir tout à fait. Si j'avais pu faire un petit voyage en Italie, je ne doute pas que de te voir ne m'eût fait un grand bien, mais il faudra bien que cela arrive un jour.
Nous menons une vie bien triste à présent : voici plusieurs jours qu'on n'a reçu de tes nouvelles et, malgré soi, on est inquiet. Il me tarde bien de voir l'Empereur sortir de là-bas : j'espère qu'il n'ira pas plus loin que Madrid, car cela désolerait tout le monde, et cela serait vraiment imprudent.
Je reçois souvent des nouvelles de la reine de Naples ; elle a été bien contente de toi à son passage à Milan.
Adieu, je t'aime et t'embrasse. Mille choses à ma soeur ; on parle déjà dans le monde de la beauté de Mlle Joséphine.
Hortense
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" Quel est ce plan dont parle Sophie ? Dites-lui que je n'oublierai jamais ce qu'elle a fait pour moi. Comme je l’aime profondément. Quel plaisir m’ont fait tous ses petits cadeaux, l’aigrette, le petit collier, les romances, le cachet, la croix.
* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.65)* Hortense, reine de l'Empire (Constance Wright / Arthaud / p.128)* Secrets et malheurs de la reine Hortense (Pierre de Lacretelle / Hachette / p.115
"Je ne pourrai vivre sans ma tante (autre surnom d'Hortense) et toi. Fais-lui faire un petit cachet, gravé d'une feuille d'aloès, avec autour cette devise : Praemium oevi aurea dies - Un jour d'or est la recompense d'un siècle d'attente..."
"Je suis fier d'obtenir ce poste et de le devoir à celle à qui déjà je dois tant."
* Morny, un voluptueux au pouvoir (Rouart / Gallimard / p.42)* Hortense, reine de l'Empire (Constance Wright / Arthaud / p.129)