Le Ministre des Affaires étrangères au Ministre de France au Mexique Paris, le 12 avril 1862 | affaire mexicaine

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Contenu de la correspondance

... Le langage tenu à M. le comte de Flahault par lord Russell m'autorisait à vous dire précédemment, comme je l'ai fait, que le Gouvernement anglais partageait à ce moment notre opinion sur la marche suivie dans les dernières négociations avec le Gouvernement mexicain...
Signé Thouvenel

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... Les explications dans lesquelles je suis entré à cet égard avec lord Cowley, et que j'ai invité M. le comte de Flahault à répéter à lord Russell, ont été conformes à tout ce que je vous disais dans ma dernière dépêche ...
... Ainsi que vous le verrez par une dépêche de M. le comte de Flahault, lord Russell a tout à fait admis avec nous que les demandes formulées par un des représentants des Puissances alliées n'étaient point astreintes à l'obligation d'être, au préalable, approuvées par les deux autres...
... Je ne vois, en effet, nulle raison, comme j'ai autorisé M. le comte de Flahault à le dire, que nous hésitions plus tard à libérer le Gouvernement mexicain de la portion du chiffre de l'indemnité primitivement fixée qui dépasserait ce que nous serions légitimement fondés à demander, examen fait de tous nos préjudices...
Signé Thouvenel

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Mon cher Thiers,
Je viens de terminer la lecture de votre livre LX, contenant le récit de la campagne de 1815 ; elle a réveillé en moi tous les tristes souvenirs de cette douloureuse époque et c'est le cœur encore tout gros, que je veux vous dire les impressions qu'elle m'a causée.
A moins d'être historien infidèle, vous aviez une pénible tâche à remplir et je dois dire que vous l'avez accomplie, tout en gardant pour la mémoire de ceux dont vous aviez à relever les fautes, le respect que leurs services antérieurs et leurs grandes infortunes depuis, doivent inspirer.
Votre devoir envers la mémoire de l'Empereur vous imposait aussi celui de faire retomber nos malheurs sur la tête de ceux qui en étoient les véritables auteurs, et vous l'avez merveilleusement fait, et également bien fait de dire qu'à aucune époque de sa vie l'Empereur n'a montré plus d'énergie, plus d'autorité, et une plus grande capacité comme chef d'armée.
Grouchy a, comme vous le dites, été dans une sorte d'aveuglement pendant les deux jours où il auroit pu sauver l'armée et la France, du moins pour quelque temps, et c'est d'autant plus inconcevable que les paroles que lui a adressées l'Empereur au moment de le quitter et que Gérard vous a répétées, sont textuelles. Je les ai entendues et elles sont gravées dans ma mémoire.
Quant au Maréchal Ney, sa conduite aux Quatre-Bras est celle que vous lui prêtez et mon rapport à l'Empereur quand je l'ai rejoint le lendemain matin est aussi tel que vous le représentez.
Venant maintenant à la bataille de Waterloo elle-même, vous en faites une description vraie, et si nous avions causé ensemble de toutes ces malheureuses affaires, je vous aurais raconté une circonstance qui confirme ce que vous dites à propos de l'attaque de la cavalerie, ordonnée par Ney. Voyant la position de l'ennemi dégarnie, il a cru que le duc de Wellington avait commencé son mouvement de retraite, ne se rappelant pas que les Anglais ne couronnent jamais les hauteurs et placent toujours leurs troupes en arrière du rideau. J'étais auprès de l'Empereur sur le tertre où il s'est placé pendant une grande partie de la journée, lorsqu'il a vu Ney commencer son mouvement et faire passer le ravin à un corps de cavalerie, et il s'est écrié, " Voilà Ney, qui d'une affaire sûre, fait une affaire incertaine " (ces mots aussi sont stéréotypés dans ma mémoire), " mais il n'y a plus d'autre chance que celle d'appuyer le mouvement " - et alors, s'adressant à moi, il me chargea de porter à toute la cavalerie que je rencontrerais, l'ordre d'appuyer les troupes que Ney avait lancées au travers du ravin contre l'ennemi.
Tristes souvenirs, et q'il ne faut pas vous le dissimuler, vous attireront probablement des rancunes et du mauvais vouloir de la part de ceux qui, ayant hérité d'un nom glorieux, seront blessés des justes remarques qui sont de nature à en diminuer l'éclat : mais lorsqu'on a entrepris la tâche de raconter l'histoire de son pays, on ne doit jamais oublier que le premier devoir de l'historien est de dire la vérité.
Flahault.
P.S. J'ai eu entre les mains l'autre jour toute la correspondance du gouvernement anglais et de l'amirauté avec mon-père Lord Keith et Sir H. Hotham et le Capitaine Maitland pendant cette abominable et cruelle conduite, si dépourvue de tout sentiment de générosité, que l'on a tenue envers l'Empereur quand il s'est livré lui-même en 1815. Vous parlez dans votre histoire de ceux qui lui ont conseillé de ne pas se rendre aux Anglais. Personne ne l'a fait avec plus d'insistance que moi. Je lui ai dit qu'il ne fallait attendre aucun sentiment généreux d'un gouvernement collectif et responsable, et je lui ai non seulement conseillé de donner la préférence à l'Empereur Alexandre, mais je me suis offert pour aller auprès de ce monarque. Je lui ai dit que l'Empereur Alexandre sentirait qu'il serait responsable devant l'histoire de la conduite qu'il tiendrait envers lui et que je ne doutais pas qu'il ne lui offrît un asile sûr.

* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.149-150)* The First Napoleon / Some unpublished documents from the Bowood papers / The Earl of Kerry / p. 317 à 319