lettre de Madame de Souza à la comtesse d’Albany | Paris, le 4 mars 1811

La Comtesse d’Albany
Lettres inédites de Madame de Souza (et d’autres…)
(Le Portefeuille de la comtesse d’Albany : 1806-1824, par Léon-G. Pélissier)


 Les annotations (en italique) sont de Léon-G. Pélissier ; Les passages [entre crochets] sont dans Saint-René Taillandier ; “Néné” est le surnom que Mme de Souza a donné à Charles de Flahaut, son fils ; les sujets concernant Charles de Flahaut sont reproduits en rouge ; l’orthographe ancienne est respectée.

 lettre de Madame de Souza à la comtesse d’Albany
Paris, le 4 mars 1811

 

[Ma bonne, mon excellente amie, je vous aime de toute mon âme, et je suis si fatiguée de ma chasse aux mots (La correction des épreuves dont il est question dans la lettre précédente.) que je n’ai que le tems et la force de vous repetter que je vous aime et que je me porte bien. J’ai déjà deux volumes d’imprimés. A la fin du mois je vous dépêcherai ces petites (“Eugénie” et “Mathilde”) que je mets sous votre protection si l’on veut les critiquer chez vous. Florence est une si petite ville en comparaison de notre capitale du monde, que j’ai mancqué dire dans votre endroit. (Ce “dans votre endroit” fait un digne pendant au mot de Bertin : Que faites-vous donc dans une ville de province (4 septembre 1808). (Les Corr. de Fabre, p.4) Cela vaut le fameux “La Grèce ? Que nous importe cette localité ?” dont Flaubert se moquait tant.) Je vous remercie encore mille fois de votre bonté pour le Carlino. (Un tableau procuré par Fabre) Tant mieux que la récolte n’ait pas été plus grande, car je crois que je n’aurai rien de la passion de Mme Laval (S. avait écrit d’abord de ce, puis un nom qu’elle a soigneusement biffé; on y distingue : roi de Naples : ce serait donc Murat qu’elle a jugé prudent de désigner par cette périphrase) après tous mes marchés conclus ; mais l’exactitude à la parole n’est pas à la mode chez lui.

J’ai bien pensé au chagrin qu’avait M Fabre de la ruine de son ami. (Bertin, à peu près ruiné par la faillite Nicole.) Dites-le lui bien, je vous en prie, mon excellente amie. Moi je prends les amitiés comme les préventions de mes amis? [La casa vous aime, vous honore, vous attend ; mes beaux jours commenceront au mois de juin.]

[Ma bonne, bonne amie, je vous embrasse encore, et je me trouve bien étonné de savoir mettre des points sur les is, moi qui ne suis guère pointilleuse.]

L’alchermès est arrivé. Charles est pénétré de reconnoissance, mais il n’ose plus vous l’écrire après avoir tant tardé.

[Mille et mille complimens à M Fabre. Nous avons le plus beau tems du monde. Ma chère amie, que je serai heureuse de vous revoir.]

[Le portefeuille de Mme d’Albany]