lettre de Charles de Flahaut à la comtesse d’Albany | Drummond-Castle, le 30 juin 1817

La Comtesse d’Albany
Lettres inédites de Madame de Souza (et d’autres…)
(Le Portefeuille de la comtesse d’Albany : 1806-1824, par Léon-G. Pélissier)


 Les annotations (en italique) sont de Léon-G. Pélissier ; Les passages [entre crochets] sont dans Saint-René Taillandier ; “Néné” est le surnom que Mme de Souza a donné à Charles de Flahaut, son fils ; les sujets concernant Charles de Flahaut sont reproduits en rouge ; l’orthographe ancienne est respectée.

 lettre de Charles de Flahaut à la comtesse d’Albany
Drummond-Castle, le 30 juin 1817

 

MADAME,

Vous m’avez traité avec tant de bonté depuis mon enfance, et l’année dernière encore vous m’avez donné une preuve si aimable que, quelques fussent les circonstances, cette bonté était toujours la même, que j’ose espérer que vous voudrez bien apprendre avec intérêt mon mariage avec miss Mercy Elphinstone, fille de Lord Keith.

Quoique par sa naissance et sa fortune, elle pût prétendre aux plus grands partis de l’Angleterre, elle leur a préféré un étranger malheureux. (Cet étranger malheureux était pair de France, général de division, comte de l’empire, et amant de la reine Hortense : c’était assez de titres à émouvoir le coeur d’une jeune anglaise sentimentale. Il dut, au surplus, donner sa démission de général pour conclure ce mariage.) Sa famille n’a pas vu notre mariage d’un oeil favorable, ce qui, vu le parti que j’ai pris (Le parti politique) et les préjugés anglais contre les étrangers, ne vous étonnera pas. Mais je mettrai tous mes soins à détruire les impressions fâcheuses qu’elle peut avoir contre moi, et à leur prouver que mon pays, quoiqu’il ne soit pas connu pour cela, peut aussi produire de bons maris.

Je vous écris, Madame, de Drummond-Castle, qui a souvent retenti de votre nom et des sentimens de fidélité qu’il inspiroit à ses habitans. La famille de ma femme a souffert pour cette fidélité. J’espère, Madame, que ce sera pour vous une raison de la recevoir avec bonté, si comme je le désire, d’ici à un an ou deux, je suis assez heureux pour vous la présenter à Florence. Je n’oublierai jamais que, malgré sa cocarde française, vous y avez reçu votre favori Néné, exception dont il étoit aussi fier que le duc de Feltre, alors général Clarke, étoit jaloux (Pendant son séjour en Toscane (1801-1804), comme ambassadeur auprès du jeune infant de Parme, devenu roi d’Etrurie. Il se rapprocha de la comtesse par les services qu’il rendit à Fabre.)

Agréez, ma chère et bonne madame, l’hommage du sincère et inaltérable attachement de votre dévoué

CHARLES DE FLAHAUT

[Le portefeuille de Mme d’Albany]